Ca y est, après environ 1 mois et demi dans la sécheresse sud-américaine, nous voilà dans la jungle, ah que ça fait du bien! Des arbres, de l'humidité, des cours d'eau loin d'être asséchés, ça nous avait manqué.
Le point de départ du tour est à Rurrenabaque. C'est disons le centre névralgique de toutes les aventures alentours. On s'en va un matin à bord d'un petit bateau traditionnel en compagnie de 2 Français, Margot et Thomas. On a choisi la compagnie Mashaquipe pour notre visite de la jungle et de la savane car ils étaient recommandés sur les blogs de voyageurs et qu'ils nous assuraient qu'on serait maximum 5 pour les tours avec notre guide. C'était bien le cas, on n'était que 4, la grosse classe quoi. Et on s'est bien trouvé avec nos amis alsaciens.
Après 1h30 de navigation, on s'arrête dans un petit village d'indigènes. On s'en va découvrir comment ils récoltent le sucre de canne. Après avoir récolté les tiges, on va récupérer le jus vers une machine digne d'un ancien temps mais néanmoins fort ingénieuse. Les troncs de l'arbre sont insérées dans un pressoir activé à la force humaine. On y écrase les branches entre 2 cylindre et il en résulte une quantité de jus incroyable. C'est que de l'eau ces arbres, et du sucre évidemment, car sinon, ça ne s'appellerait pas canne à sucre, mais canne à eau ou canne à sel ou canne à son... Hum on délire, pardonnez-nous! Bref, on passe à la dégustation ensuite et ce breuvage, et bien, il est fort sucré évidemment, un peu écoeurant, mais pas pour autant mauvais, c'est assez bizarre, c'est une sorte de sirop. On aura pu déguster la canne en la machouillant. Pour ma part, j'aurai préféré cette méthode là, plus originale, assez fou tout ce liquide dans si peu de bois!
Après cette belle visite, on repart direction le lodge que l'on atteint disons 1h-1h30 plus tard. Là, on est obligé de faire trempette et de traverser un bout de rivière pied nu. Aie, les cailloux ça fait mal (nos sacs avec nos tongs n'étaient pas dans le même bateau)! On arrive dans un charmant petit hameau de huttes tenu par des locaux. Tous les travailleurs de la compagnie sont de la région, voilà une autre raison pour laquelle on a opté pour Mashaquipe. Après l'installation dans une cabane idéalement sommaire mais fournie en bons matelas (on passera nos meilleurs nuits de toute l'Amérique du Sud à Rurren et alentours, dans le calme, loin des klaxons de la ville), on s'en va manger en compagnie des autres groupes de touristes. La compagnie a également de grands cuisiniers, on se sera fait péter la pense tout le long avec leurs bons petits plats, que ce soit dans la jungle ou la savane.
Suite du programme, marche en forêt. On s'arme de répélent contre les insectes et on se lance. Quelle magique découverte. On y voit une flore des plus étonnantes. Les arbres ont pour beaucoup des particularités. Certains ont des bourgeons qui piquent pour se défendre contre les prédateurs, certains puisent dans le sol eau, nutriments et stockent tout à un endroit du tronc, ce qui fait que celui-ci est tout droit sauf à un endroit ou il y a un gros bulbe (ça fait un peu comme quand un serpent a avalé une plus grosse proie que lui). La palme de l'arbre le plus ingénieux revient au socratea exorrhiza, palmier à échasses, plus souvent dénominé comme l'arbre marcheur. Celui-ci, à la recherche de la meilleure luminosité, fait pousser des racines tous les 2-3 mois et en abandonne d'autres au fur et à mesure. Ces racines ne sont pas dans le sol, ce n'est pas un arbre traditionnel, elles sont en dehors de la terre. Cet arbre n'est en fait pas formé d'un seul tronc en sa base mais de divers racines. Une magie de mère nature. En ce qui concerne la faune, on est moins chanceux, pour le coup on ne voit que des fourmis de toute sorte dont les bullet ants (leur nom n'est pas volé!) qui peuvent bien vous faire souffrir si elles vous mordent. On voit aussi quelques araignées mais surtout des toucans et des colibris.
Après une bonne nuit de repos, on s'en va explorer la jungle à nouveau en compagnie de notre guide Eloy. On découvre toujours une multitude d'insectes et des beau arbres. On se croirait dans un documentaire sur ARTE par moment. Le must de la marche est la découverte de l'uña de Gato, l'arbre gourde allons-nous l'appeler. Tu peux découper des branches de celui-ci si t'as soif, il regorge d'eau de pluie, potable, un luxe non-négligeable dans la jungle. Après 3-4 heures de rando, on arrive au camp pour la nuit. Ici, c'est sommaire au possible, une bâche pour se protéger de la pluie, une moustiquaire pour se protéger des moustiques (non sérieux? lol) et un matelas ultra fin pour ne pas trop souffrir du dos (peine perdue). Après s'être rassasié, on repart en expédition, cette fois-ci, tous mes compères aperçoivent le singe araignée, plus grand primate d'Amazonie. En fin de journée, on se pose au bord d'une falaise pour y observer le retour des plus grands perroquets de la selva, les aras macao. Ils sont très bruyants mais surtout splendides. Leurs couleurs vives nous éblouissent, même si Tam, sous l'effet du vertige, ne profite pas au max de ce merveilleux moment. On rentre par la suite avec les lampes frontales car la nuit est tombée. Après le souper, on part même en expédition de nuit où l'on aperçoit des araignées, des agoutis et également des traces de jaguars toutes fraiches, ils nous suivent les cocos, aïe aïe aïe!
Le lendemain aurait pu être notre dernier jour sur Terre. Après un réveil matinal pour aller observer une nouvelle fois les aras, mais cette fois-ci depuis le bas de la falaise, on part au bord de la rivière Tuichi pour aller construire un radeau à l'aide de troncs et de cordes afin de rejoindre le camp de base. Après le montage, en embarque mais sans gilets de sauvetage (pas malin tout ça, mais ça a peut être sauvé une vie). On est tout joyeux mais on ne sait pas que l'on va vivre dans les minutes à venir les pires moments de notre existence! On me confie la pagaie à l'avant et le guide à l'arrière a une tige en bois pour pousser au sol. On part depuis un affluent calme du Tuichi. Le hic, c'est que ce dernier est beaucoup plus puissant, surtout que ces eaux sont anormalement élevées pour la période sèche. Le guide nous l'a rappelé pleins de fois, il y a beaucoup beaucoup d'eau, mais il nous a fait quand même allé sur le radeau. Du coup, lorsque l'on se lance sur le cours d'eau principale, son courant est beaucoup trop fort, on ne parvient pas à s'éloigner du bord, j'ai beau pagayer de toutes mes forces, ça n'y change rien. On part tout droit contre un amas de bois. Tous dans notre tête, on s'est dit qu'on allait rebondir et continuer comme si de rien n'était. Et bien on s'est gouré propre en ordre. Notre embarcation se renverse et par chance on a le réflexe de tous se retenir au radeau et de résister de notre mieux au fort courant. Tous? Non, malheureusement non, il manque Thomas. Mais merde, c'est pas possible, il est coincé sous les rondins de bois, pris au piège comme un poisson dans un filet! On l'entend taper contre le bois mais on ne peut rien faire, on est impuissant, c'est affreux, jamais on s'est senti aussi mal! Sa copine hurlait à la mort. Heureusement, après environ 45 secondes, il a pu ressortir. Il nous expliquera qu'il était coincé au fond de l'eau, qu'il a essayé de se sortir là en se tirant le long des bois mais que ces derniers se sont désolidarisés par 2 fois. Il était près à abandonner quand il a enfin pu attraper le pied du guide, qui l'a pour le coup foutu dans une belle merde mais qui lui a aussi sauvé la vie! On respire tous, putain, il est remonté! Pfiou! Maintenant, reste à réussir à remonter sur l'amas de bois pour pouvoir s'en sortir. Heureusement, 2 autres guides viennent nous aider à rejoindre l'amas. Ce n'était pas gagné d'avance, la situation était délicate. On a finalement pu grimper sur un bateau depuis là afin de rejoindre le camp de base et surtout de se mettre en sécurité. Les caïmans ne nous ont pas dévorés, autre ouf de soulagement! On tombe tous dans les bras des autres, on pleure à chaude larme, on n'est pas passé loin de la catastrophe! Heureusement que c'est Thomas qui est tombé (il est maitre nageur et peut tenir sa respiration 4min30 au calme) et pas quelqu'un d'autre car il y aurait sûrement eu des morts dans ce cas là! Mais bon, l'essentiel est là, on est tous en vie. Il a perdu son appareil photo pour se sauver, ça saoule, mais ce n'est pas grave vue la situation!
De retour au lodge, tout le monde prend des nouvelles de nous. Les guides ont eu très peur. Mais ils ont désormais surtout peur que l'on porte plainte et ça se ressent. Il y a disons un peu de tension dans l'air. On nous propose marche ou artisanat pour l'après-midi, mais ce sera repos pour nous, il faut que l'on récupère de nos émotions.
Le lendemain, c'est la fin du tour dans la jungle. On retourne en bateau à Rurrenabaque en 1 heure (on descend la rivière). Margot et Thomas se plaignent de nos mésaventures et demandent réparation. Pour notre part, on leur fait comprendre leurs graves torts et on les incite clairement à changer les choses. Mais on ne porte pas plainte car c'était un accident et que c'était surtout beaucoup de poisse. On continue donc l'aventure dans la savane sans nos amis strasbourgeois. C'est triste, ça ne sera pas la même chose sans eux!